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BLOGART(LA COMTESSE)
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polar
22 octobre 2009

Les rapaces

    J'ai présenté à quelques étudiants retraités une petite communication sur le film noir.Le faucon maltais croise-t-il encore en altitude cinéphile?A mon avis oui mais il est vrai que pour la filmo d'Humphrey Bogart on peut trouver plus objectif que moi.Mais quel plaisir de se replonger dans les méandres imaginés par Dashiell Hammett et si bien relayés par John Huston.Film véritablement fondateur du genre Le faucon maltais d'Hammett a bel et bien " pris le crime dans le vase vénitien où on l'avait rangé pour le laisser tomber dans la rue"(G.B.Shaw).Dès après le générique Frisco est là,son pont,son port,sa plaque de privés associés.Et Sam Spade,à jamais Bogart, à jamais cette image du dur à cuire,que les vicissitudes n'ont pas tout à fait blasé.D'ailleurs il le dit à la fin à Brigid la meurtrière:"Je ne suis pas aussi pourri que je le laisse dire"

    Tout de tabac,tout de chapeau,tout d'ironie,et une certaine cruauté,Sam Spade n'a guère le temps ni le goût de regretter son associé assassiné.Déjà débarquent les comparses,ce trio infernal du film noir,Peter Lorre vaguement levantin et moins vaguement efféminé,les 280 livres de Sydney Greenstreet,souvent filmé en contre-plongée, falstaffien et drôle dans sa frénésie de quête du faucon,Elisha Cook petite gouape gitonesque.Oui ici comme dans le roman on appelle un chat un chat.Ca ne se fait plus guère et ça tombe presque sous le coup de la loi.D'une très grande fidélité au livre qui était c'est vrai presque découpé Huston insuffle sa propre recherche mythique dans cette chasse à l'oiseau noir(Huston plus tard ce sera bien d'autres quêtes,Le trésor de la Sierra Madre,Moby Dick,Les racines du ciel,Le malin,L'homme qui voulut être roi).

   Les femmes du film noir,comme on s'y attendait,vénéneuse ou victime,est-ce la même?Si les pires gangsters semblent conserver un zeste de franchise,les femmes,elles,ne sont que duplicité et manipulation.Ouvertement machiste Le faucon maltais ne s'embarrasse guère de circonlocutions.Mais plus  que tout il y a dans la plupart des bons films noirs cet humour féroce et salvateur,cette ironie mordante,ce sarcasme comme les dents de Bogart,dont on ne sait si c'est baiser ou morsure.Mais dites-moi qu'est-ce vraiment que Le faucon maltais?Sam Spade,alors que la femme s'enferme dans la cage d'ascenseur qui préfigure une autre cage,nous le dit sans ambage:"That's the stuff dreams are made of.

    On pourrait gloser très longtemps sur l'importance du noir,roman ou film.On peut aussi et surtout le lire ou le voir.Cest tellement mieux que de débattre.

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7 juillet 2009

Un enfant pour un autre

     Dans ce beau coffret DVD Kurosawa Films noirs après Chien enragé de 49 voici Entre le ciel et l'enfer de 63.C'est une histoire de rapt d'enfant avec rançon.Vaguement inspiré d'Ed McBain (87th precinct) Kurosawa découpe son film,long de 140 minutes en deux parties bien tranchées.La première,très précise et presque huis clos montre les tractations de Gondo,riche industriel rude en affaires,avec ses collaborateurs et son féroce appétit de puissance.Cela nous vaut des affrontements verbaux très efficaces que la caméra épouse au plus près.Une sorte de conseil d'administration comme si on était là,derrière un rideau,à observer la dureté des échanges d'un Japon économiquement en plein boum et moralement toujours convalescent.Puis le téléphone...et l'enlèvement du fils de Gondo.Tout bascule,et le film aussi qui va dorénavant laisser libre l'enquête policière et les réactions de l'industriel qui va apprendre que ce n'est "que" le fils de son chauffeur qui a disparu.Cela nous vaut une très belle scène intimiste entre Gondo et sa femme..

   Plein d'idées Entre le ciel et l'enfer va nous entraîner dans la tourmentée recherche du ravisseur qui a la particularité géographique de voir la maison de Gondo.Cet extraordinaire artifice de contre-plongée imprime au film un va et vient des plus oppressants.D'autant plus que la vitesse sera un élément majeur de l'évolution de l'histoire.Il fait très chaud dans les bas-fonds de Yokohama que surplombe la splendide villa de Gondo.Parmi les morceaux d'anthologie qu'il ne faut pas trop dévoiler,les scènes dans le train à grande vitesse ont plu à Scorsese et De Palma,à l'évidence.Mais je vous laisse dans cette fournaise urbaine et nippone,dans ces rues encrassées et ces boîtes douteuses.Vous n'oublierez pas ce magistral coup de poing que le maître,décidément à l'aise dans tous les cinémas,nous assène avec génie dans ce noir et blanc éloquent,sans détective héros,sans femme fatale,mais pas sans l'émotion conjuguée du film d'action qui n'oublie pas d'être intelligent.Prochainement le troisième bijou Les salauds dorment en paix.

28 mars 2009

Le coupable faux

 

   Quan d j'avais vu pour la première fois L'invraisemblable vérité(Beyond a reasonable doubt),film de la période américaine de Fritz Lang (1956) j'avais été estomaqué.Sur le thème très cher à Lang de la culpabilité,des apparences,de la manipulation,le Viennois brode un artifice diabolique  sur l'erreur judicaire et l'exécution capitale.Pas de grand discours moral sur l'horreur de la chaise.Le propos de Fritz Lang est une profonde réflexion,hors de toute psychologie logorrhéique,sur la vraisemblance,la fragilité des témoignages, ce dans un climat très américain fifties(procureur candidat politique,liberté de la presse,aisance fiancière).Frappé de plein fouet lors de la première vision j'ai été un peu désappointé car ce film m'avait vraiment stupéfié par ses rebondissements.

   La vérité n'était donc plus tout à fait invraisemblable pour moi et c'est ainsi que j'ai pu apprécier l'ambiance film noir et l'aptitude de Lang à se couler dans la société américaine,et ce dès ses premiers film,Fury notamment qui n'est pas sans lien avec L'invraisemblable vérité.Sobrement traité,hors de toute digression et de tout bavardage Beyond a reasonable doubt  scotche le spectateur,lui aussi fragilisé,manipulé,pantelant.Et reparaît alors un certain Dr.Mabuse,expert en marionnettes humaines.Et le fait que ce soit plutôt pour la bonne cause ne nous rassure guère plus.

27 juin 2008

Rudes riffs dans le Montana

   Avant tout l'avis d'Eireann BURKE James Lee / le boogie des rêves perdus.De toute façon un livre avec en couverture Lucille la gutare de B.B.King et un titre pareil ne peut que séduire les amis du blues ce qui fait déjà du monde.Deux potes musiciens sont sortis de taule en Louisiane et se retrouvent dans ce Montana qui nous fait rêver.Burke a situé la plupart de ses livres dans le Sud et son héros récurrent s'appelle Dave Robicheaux.Ici nous abandonnons les bayous et le jambalaya pour le Nord-Ouest cher à Jim Harrison, Thomas McGuane ou Larry Watson.Dans cet état rural aux paysages magiques la nature sait aussi rudoyer les hommes,souvent des hommes simples qui ne sont jamais si bien qu'à l'affût du coq de bruyère un matin de neige.

   Le décor planté est ainsi mûr pour la tragédie car bien que vieux de trente ans ce roman met en scène les désastres écologiques de ces forêts trouées d'industries du bois ou du papier qui polluent allégrément. Les habitants dégainent parfois un peu vite et l'amitié peine à résister à la violence toujours à fleur de peau,avec son cortège d'alcools et d'addictions.Pourtant quelques jolies scènes presque idylliques jalonnent ce bon roman très américain empli de modestes et de besogneux.La pêche à la truite est un peu l'archétype de ces respirations avec le barbecue qui pourrait s'ensuivre.Mais au Montana comme partout les réunions d'amis finissent parfois mal.Il arrive aussi que se désaccordent le piano blues et les pickings country.

    Un peu de stop et probablement un pick-up vous entraînera du côté de Missoula,sur ces collines qui lorgnent vers les Rocheuses, reste d'Amérique sauvage aux vols d'oiseaux comme Audubon les dessinait. C'est peut-être une des dernières mises en demeure.Une chose m'ennuie:ne pas avoir le vocabulaire fleuri et précis pour décrire arbres,animaux ou phénomènes naturels comme savent le faire ces auteurs boucanés par les marais de Louisiane ou le vent du Nord.

6 juin 2008

Etang tragique

    Brève  critique pour ce livre pas désagréable qui nous transporte dans le Texas des années trente,sur les traces d'un tueur des bayous,et dont la jaquette évoque La nuit du chasseur.Outre que je n'ai jamais lu La nuit du chasseur même si j'ai vu le film une douzaine de fois je trouve cette assertion très exagérée.Les marécages est un polar bien ficelé,muni de tous les signaux du polar rural américain, négritude, racisme, abrutissement de la plupart des personnages, culte proche du vaudou.Relations entre blancs qui s'avèrent être noirs,descendants d'esclaves forcément innocents mais forcément soupçonnés.K.K.K comme on l'imagine et une famille où les enfants s'aventurent aux frontières du fantastique.Ce roman se lit facilement mais souffre cependant d'un très gros défaut:je n'y ai trouvé aucun suspens véritable,ce qui est quand même un comble. Pas la mondre surprise,pas trace d'étonnement.On peut le lire,on peut aussi lire autre chose sans trop de crainte d'être passé à côté d'une perle rare.

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9 avril 2008

La fille du commissaire

      Pour cette enquête Wallander cède la place à sa fille Linda qui a décidé de suivre ses traces...Les polars de Mankell sont maintenant bien balisés en France avec ce corollaire inévitable qu'on se sent en pays de connaissance et que la surprise venue du Nord s'est pas mal volatilisée.Mon préféré est Les chiens de Riga.Il me semble avoir presque déjà lu ce livre et ceci n'est pas très bon signe.Serait-ce la lassitude de l'univers de la police de Scanie avec,comme ailleurs,ses pervers,ses gourous,ses dérives et ses rituels?De plus je trouve que les rapports difficiles entre Kurt et sa fille Linda alourdissent une intrigue qu'on aimerait resserrée,ce qui permettrait d'ôter une centaine de pages.Il me semble que les auteurs de polars ont actuellement tendance comme les cinéastes à faire long,ce qui est pour moi aveu de faiblesse.Le rythme,les gars,le rythme!

   Non que Avant le gel soit à dédaigner pour qui ne connaît pas encore Mankell mais je suis d'accord avec Dasola.Tout cela me paraît assez normal et je crois que je vais gentiment congédier Henning Mankell de ma liste d'attente.Il aura droit à de confortables indemnités pour services rendus à la Scandinavie et à mon patrimoine littéraire.La chair est triste hélas mais heureusement je n'ai pas lu tous les livres.Un beau personnage,très épisodique,aura marqué cette enquête pour moi,l'orfèvre qui fabrique les clés d'église,quel beau métier.Et les mots de Mankell parfois touchent très juste: "Même si l'issue est écrite à l'avance on peut fatiguer la mort pour qu'elle ait juste la force de porter le coup fatal",écrit-il à propos de la fin d'un ami de Wallander.

14 septembre 2007

Trois nouvelles de Chandler avec cigarettes,whisky etc...

    Parce que les écrivains comme Chandler font partie de moi,au même titre que mon saint patron Bogart,que les films noirs imbibés et que les blondes fatales de cinéma.

    Parce que ces trois nouvelles me plongent dans une Amérique en noir et blanc où les types qui se font buter le font avec élégance et que le voyage nous mène des grandes métropoles aux paisibles lacs de montagne,au long de routes pas encore trop chargées où toutes les rencontres sont possibles,bonnes fortunes ou balles perdues.

    Parce que le style de ces durs à cuire dont j'ai déjà souvent parlé est rude,âpre,sans détours et par dessus tout pétri d'humour comme cette phrase d'anthologie:Le manche en corne du couteau de chasse en saillie sous son omoplate gauche ne semblait pas le gêner du tout.

    Parce qu'il y a longtemps que la littérature noire,les Black Mask Stories,ou les histoires de détectives bien troussées font partie des Belles Lettres.Et parce que les cadavres de Chandler, Hammett, Cain,McCoy et consorts porteront à jamais pour moi de magnifiques costards tout en se foutant pas mal de leur posthume célébrité. Un peu comme Van Gogh.Tiens,c'est ça,très bon ça!Ces gars-là c'étaient des Van Gogh,des Modi...

25 août 2007

De mèche avec Hammett

    J'ai souvent parlé de Hammett,Chandler et autres et toujours de façon admirative.Et le cinéma ne s'y est pas trompé avec nombre d'adaptations dont certaines plus que mythiques(voir la photo de l'accueil).La réalisation de Stuart Heisler,en 42,avec une écriture de Jonathan Latimer,de La clé de verre,roman publié en 31 mérite qu'on s'y attarde.Ce film noir que présente très bien Philippe Labro qui s'y connaît,tourné en un noir et blanc studio Universal typique,nous offre un trio d'acteurs convaincant. La blonde fatale a les traits et la mèche très suggestive de Veronica Lake,dangereuse comme savaient l'être les femmes dans ces histoires de magouilles politico-gangstero-policières.Encadrée d'Alan Ladd et Brian Donlevy dont l'amitié sera mise à rude épreuve elle est assez inoubliable.Ladd est très bon,à mon avis meilleur que dans ses westerns où je l'ai toujours trouvé un peu terne. Donlevy est un acteur méconnu qui donne beaucoup d'étoffe à son personnage ambigu de faiseur de rois,ou plutôt de gouverneurs.

    On sait que Dashiell Hammett avait une écriture comportementale qui laissait peu de place à la psychologie et au bla-bla-bla.Le script de Latimer,un spécialiste,et la mise en scène de Heisler sont au diapason d'un film bref et musclé que Bertrand Tavernier déteste dans son ouvrage de référence sur le cinéma américain.J'aime bien le grand Bertrand qui a fait beaucoup pour sortir de l'ombre de nombreux films mais là je ne suis pas de son avis.Je ne me lasserai pas de ces voitures qui sillonnent la ville américaine sous la pluie,se garent sans problèmes et laissent sortir un politicard,deux sbires et une vamp prompte à prendre le bras du plus fort tour en lançant une oeillade au plus beau.

   Et La clé de verre recèle des dialogues pointus souvent très drôles dont j'ai retenu cette phrase qui suffit à mon bonheur:"Ma première femme était deuxième en cuisine dans un restau minable de la Quatrième Rue".Ou encore un tueur genre pithécanthrope,ceci dit sans vouloir blesser les pithécanthropes, déclarant, affamè:"Quand je mange un steak j'aime sentir qu'il me mord."

12 août 2007

Le privé,version nordique

    

           Le privé Vrag Veum mérite de rejoindre le Wallander de Mankell et le héros de l'Islandais Indridason, dont j'ai oublié le nom,devenus des célébrités dans le petit monde du norpolar(quel barbarisme). L'enquête qu'il mène dans sa Norvège natale est certes de facture classique mais bien ficelée et d'une lecture aisée. Ce roman a été publié en Norvège il y a quand même trente ans,ce qui lui donne l'avantage de ne pas crouler sous une overdose de technologie parfois fatiguante.

                 Dans les rues norvégiennes la filature se fait à l'ancienne dans une petite voiture discrète et toussotante. Veum sait faire la planque pendant des heures et ne roule pas sur les couronnes.L'intrigue n'est pas bouleversante d'originalité mais allez donc tuer de manière inédite de nos jours.Une villa,une maison avec une porte verte qui s'ouvre sur l'horreur,de cette horreur qui hante hélas nos quotidiens.Et l'éternelle et universelle rivalité souvent haineuse entre le flic et le privé,qui nous fait toujours un peu marrer.Humour présent aussi à travers quelques portraits de sous-fifres ou de spadassins.Au pays de Sam Spade et Philip Marlowe bienvenu à l'ami norvégien Varg Veum qui carbure raisonnablement à l'aquavit, version septentrionale de la gnôle,fidèle amie de l'enquêteur.

29 avril 2007

Washington D.C(Drama City)

         Classé par le mensuel Lire parmi les meilleurs auteurs américains de polars j'ai bien aimé sans plus Drama City de George Pelecanos.Il faut bien dire que la littérature policière,très attrayante par ailleurs,finit tout de même par tourner un peu en rond.C'est pourquoi je n'en lis pas trop souvent.

          Néanmoins l'intrigue ourdie par Pelecanos se laisse goûter.Je crois que le principal intérêt de Drama City tient à sa géographie.L'action se passe à Washington,plus rarement visitée par le roman noir que New York, L.A. ou Chicago.Les notes de Pelecanos sont précises et la ville est quadrillée par l'auteur comme un plan dans un commissariat.Noms de rues, marques des voitures, qualités des stupéfiants,Pelecanos est à l'évidence bien documenté. L'autre surprise me semble être la fonction des deux personnages principaux,pas des flics mais des fonctionnaires de l'ordre cependant.Lorenzo travaille pour une société protectrice des animaux et Rachel est chargée du suivi des délinquants en conditionnelle.On s'en doute, bien du travail pour tous les deux entre combats clandestins de chiens et trafics divers qui font de Washington,D.C. une capitale fédérale certes mais aussi criminelle.

21 avril 2007

Pelé,galeux,mal élevé,génial

Le polar américain     Je lis assez peu d'essais mais celui-ci m'a tenté et je ne regrette pas car au delà du côté savant et universitaire de la thèse j'ai senti le bitume sous mes chaussures,respiré les effluves des blondes fatales,et coiffé le feutre pour me fondre dans la jungle urbaine. Benoît Tadié,par ailleurs traducteur de Gens de Dublin dont on vient de parler,est maître de conférences en littérature anglaise et américaine.Il y a comme ça de bien beaux métiers...

    L'auteur replace dans leur contexte les différentes moutures du polar américain.N'étant pas un exégète je ne me risquerai pas à gloser là-dessus.Mais ce livre se lit bien.Tadié n'oublie rien.Il marque d'abord comment ce roman noir s'est rapidement affranchi des énigmes type Sherlock Holmes de la vieille Angleterre,souvent passionnantes mais loin du terrain.C'est alors l'invention de l'américain,une nouvelle langue qui a brisé les chaînes jusque là imposées par Shakespeare et Daniel de Foe.Plus près du peuple,voire de la lie,cette nouvelle approche sera celle des grands,des durs à cuire, Hammett, McCoy, Chandler,Cain,Burnett et beaucoup d'autres que Tadié nous encourage à découvrir.

   C'est évidemment un regard sur l'histoire de l'Amérique avec le rôle très important des deux guerres avec leur lot de déracinés,blessés,alcoolique,etc...Crucial s'avère aussi le mythe de l'Ouest et de la frontière avec l'idéalisation du passé et de la campagne vierge qui s'oppose à la ville corruptrice,refrain bien connu des polars et des films adaptés.Benoît Tadié inclut dans cette somme des auteurs dits nobles comme Faulkner,Hemingway et même de plus anciens comme Melville ou Hawthorne.Il sait bien nous faire comprendre que la différence est très ténue,disparue maintenant entre certains auteurs de séries noires et les classiques.Et le polar américain est en fait une aventure continue depuis les pélerins du Mayflower jusqu'à nos jours.Il insiste également sur la Bible,toujours de mise en Amérique,et nous rappelle que s'il y a de la Bible dans le Polar,il y a aussi du Polar dans la Bible:adultères, fratricides, trahisons,ivresses,fils indignes et la première femme fatale,Eve.

  Le polar américain,la modernité et le mal se lit presque comme un thriller et sa grande qualité est de donner envie de lire,de lire encore et toujours.Le polar,tempo de jazz, couleur whisky,découpage ciné,c'est vraiment pas ce que les Américains ont fait de pire.

  De haut en bas les méconnus Davis Grubb et Armitage Trail,auteurs de La nuit du chasseur et de Scarface dont on oublie volontiers l'origine littéraire.Et David Goodis,lui aussi bien servi par le cinéma(Tirez sur le pianiste,La lune dans le caniveau).

15 octobre 2006

Ce dur à cuire de McCoy

  Agrandir la jaquette de Un linceul n'a pas de poches   Que j'aime les destins de ces écrivains américains pas sortis des salons de Time Square mais blanchis sous le harnais de la crise des années trente qui suivait la Grande Guerre.Ils sont nombreux.Après John O'Hara et W.R.Burnett voici Horace McCoy dont on connaît surtout On achève bien les chevaux, l'un des témoignages les plus terribles sur cette crise économique et morale majeure de l'entre-deux guerres.Ce marathon de la danse qui ramène l'homme à la pire bestialité me semble prémonitoire des dérives de la société spectacle d'aujourd'hui.

   McCoy,comme tout le monde a fait tous les métiers depuis le conflit en Europe au journalisme sportif en passant par le taxi avant de  se retrouver à Hollywood ou il fit un petit peu l'acteur et surtout le scénariste(Gentleman Jim,Les implacables).Il a en fait peu écrit et je crois avoir presque tout lu de ce vieil Horace.D'abord des nouvelles pour le Pulp magazine Black Mask cher à Tarantino qui existèrent en Livre de poche en deux tomes,Black Mask Stories et Les Rangers du ciel(ce dernier inspiré par ses mois dans le ciel de la France en guerre).Ces suspenses aériens et policiers,ou les deux à la fois,sont bien dans la tradition des Hard-boiled writers,aussi appelés Tough guys,des auteurs du terrain,fut-il d'aviation,habitués au grand air et aux boissons fortes.

    Adieu la vie,adieu l'amour(Kiss tomorrow goodbye) est l'histoire inéluctable d'un évadé assoiffé de pouvoir,un assassin qui rencontre sur sa route femmes fatales et notables véreux.Ce type de roman,devenu classique, est écrit avec verdeur et causticité,et misogynie bien sûr.Les gants d'une femme quand elle les ôte sont des armes terribles...Je n'ai jamis vu le film avec James Cagney,au titre français débile Le fauve en liberté mais à l'évidence le rouquin irlandais avait l'étoffe.

   La littérature selon McCoy n'est pas aseptisée ni tristement et politiquement correcte.Une fille y est souvent une garce et un établissement fréquenté par les homosexuels n'est pas pudiquement qualifié de bar gay.Dans On achève bien les chevaux prévaut cette même brutalité qui en fait le chef d'oeuvre que l'on connaît,tportrait des sans espoir de la Grande Crise dont parleront si bien aussi Dos Passos, Steinbeck, Dreiser.

  Un linceul n'a pas de poches est un réquisitoire violent et désespéré contre la soumission et la veulerie à commencer par celle des clubs sportifs,déjà.Autres titres Le scalpel,Pertes et fracas.Très longtemps incompris aux Etats-Unis McCoy doit sa célébrité essentiellement à Marcel Duhamel dont la Série Noire historique a contribué après-guerre à tant de découvertes littéraires majeures.

7 octobre 2006

Le capital des Marx

     Mon excellent confrère en marxisme Eric m'a donné l'idée de vous parler des délicieux romans policiers de Stuart Kaminsky qui ont pour particularité de se dérouler à Hollywood de la grande époque. Autre particularité:ils sont affublés de titres français en forme de calembours de café du commerce comme Pour qui sonne le clap ou Chico,banco,bobo qui mettent en scène,devinez,Gary Cooper ou les Marx Brothers.

Chico banco boboKaminsky utilise les vrais décors et les vrais vedettes de Hollywood et les met aux prises avec de grandes difficultés financières ou intimes. Heureusement Toby Peters veille au grain,privé improbable croisement  des cultissimes Spade et Marlowe. C'est un détective au dos fragile,obligé de s'allonger sur une planche régulièrement et toujours fauché et plaqué. Entre escroqueries aux assurances,producteurs véreux et tueurs à gages peu loquaces Toby Peters aide Errol Flynn,Bette Davis ou Judy Garland à sortir de mauvaises passes.

    Rien de bien sérieux là-dedans mais beaucoup de clins d'oeil au cinéma que l'on aime et de bons moments auxquels il ne faut pas trop demander.Pour du plus lourd voir les "hard-boiled"(Durs à cuire) Chandler,McCoy,Hammett...A noter que Kaminsky quand il ne plaisante pas est quand même scénariste de Il était une fois en Amérique.Allez vous régaler chez 10:18,au moins une dizaine de titres parus.De puis le temps que je mets en évidence leurs couvertures ils pourraient me verser une prime.

4 octobre 2006

Le noir lui va si bien

High SierraOui le noir lui va vraiment bien au cinoche et je crois que je me serais encore plus ennuyé sans ces durs à cuire du roman américain, Hammett, Chandler, Cain et tant d'autres. Aujourd'hui gros plan sur William Riley Burnett.Pas le plus connu mais du tempérament,le gaillard.Comme beaucoup d'autres W.R.Burnett a fini par traîner ses guêtres à Hollywood qui a  adapté nombre de ses romans.Lui-même fut scénariste et on discerne parfois mal dans son oeuvre les vrais romans des scénarios parfois simples ébauches. Faulkner, Chandler, Fante, Fitzgerald ont connu la même mésaventure.

    En 1930 Mervyn LeRoy signe Le petit Cesar où Edward G.Robinson campe un saisissant gangster que l'on suit de son ascension à sa chute.C'est l'un des premiers films noirs du parlant et il marquera une  date et ouvrira la voie pour un certain Scarface de Howard Hawks dont l'un des scénaristes est  justement William Riley Burnett.

   Roy Earle lui est un truand en fin de course et souhaite se ranger des voitures.Ceci est extrêmement difficile au cinéma.Bogart incarne à la perfection cet homme traqué dont la fuite dans les montagnes ne peut qu'être fatale. C'est la dernière fois que Bogart n'est pas en tête d'affiche(derrière Ida Lupino). Raoul Walsh s'y connaît en films d'action et Huston est ici scénariste.On le voit,rien que du beau monde pour High Sierra dont le titre français est peu usité pour cause d'homonymie(La grande évasion).

    En 1950 le même John Huston réalise Quand la ville dort(The asphalt jungle) quintessence du sous-genre du film noir "casse qui ,tourne mal" où excelleront aussi Dassin et Kubrick.Construit très rigoureusement Quand la ville dort met en scène pour the ultimate knock over Sterling Hayden,Louis Calhern,Sam Jaffe et d'autres,des gueules de l'emploi comme c'est nécessaire dans le polar à l'américaine.Je vous laisse imaginer la chute sans oublier de citer une certaine Marylin dans tois furtives apparitions. Déjà une femme enfant à vous attirer des ennuis.

King ColeCes trois réussites du grand écran ne doivent pas faire oublier l'écrivain qui avait son talent bien à lui.King Cole notamment est une oeuvre majeure qui raconte la campagne électorale d'un candidat républicain ou démocrate et nous éclaire sur la démocratie-démagogie  qui est loin d'être un monopole des années trente et des Etats-Unis.Relations ambigües avec la presse,l'industrie,le commerce.Rien de nouveau sur le soleil mais raconté par Burnett c'est du solide.Avec ce qu'il faut de cigares,de pépées,de pots-de-vin...La vie quoi!

4 octobre 2006

Le piano de Truffaut

Il me semble que Tirez sur le pianiste est dans la carrière de Truffaut le seul film que l'on puisse rattacher à la Nouvelle Vague (peut-être aussi Les 400 coups). Tirez sur le pianisteEn effet et bien que Truffaut n'ait fait que de bons films son oeuvre est d'une facture assez classique éloignée de la Nouvelle Vague.

Ainsi Tirez sur le pianiste m'est apparu comme une curiosité qui ne m'a pas complètement convaincu.  Cependant le film est très intéressant,comme sautillant et un peu déconstruit, faisant voisiner Boby Lapointe chantant Avanie et framboise de toute son inquiétude exacerbée et la musique du grand Georges Delerue.Les interprètes sont très bons:Aznavour, fragile mais déterminé, Albert Remy, grand comédien peu cité à mon avis, et la toute jeune Marie Dubois.      

    Je ne connais pas le roman de Goodis et ne sais donc pas s'il avait ce côté burlesque(silhouettes des poursuivants) tout en flirtant avec la mort. Avec Tirez sur le pianiste Truffaut termine ses gammes sur le film noir et donnera toute sa plénitude avec La mariée était en noir.

17 août 2006

Polars nordiques mitigés

La Femme en vert Déjà dans la Cité des Jarres Arnaldur Indridason nous entraînait dans une Islande loin des clichés touristiques. Curieux comme ces hommes du nord(Mankell,Edwardson)savent nous dépayser avec des intrigues à la fois âpres et tendues, sans pittoresque facile. On a l'impression aussi de liens familiaux très forts entre certains personnages, des liens serrés à se rompre.

     Le polar du nord se porte bien. Qu'on se le dise et qu'on cesse en littérature française de se regarder le nombril. Dans la Femme en vert Indridason joue sur différentes époque sans que ces procédés de retour ne arrière n'alourdissent jamais l'acuité du récit. Partez vite pour cette Islande sans volcans, ni geysers, ni grand oiseaux d'Atlantique.

L'étoile du diable

  Le flic Harry Hole, créé par Jo Nesbo,est alcoolique et  vit à Oslo.Il est aussi un peu parano et il nous faut 500 pages pour venir à bout du serial killer à la mode norvégienne.Ce n'est pas un mauvais livre mais Nesbo est bien loin de la qualité littéraire de ces autre hommes du nord experts en l'âme criminelle que sont les  Suédois Mankell et Edwardson ou l'Islandais Indridason. L'étoile du diable n'a rien d'une star à mon avis.

16 août 2006

L'esprit d'Agatha

    Il y a deux manières d'adapter au cinéma les énigmes à l'anglaise d'Agatha Christie comme il y a deux héros au panthéon des enquêteurs de la perfide Albion:Hercule Poirot,belge de son état,a bénéficié de très gros moyens et distribution all-stars que ce soit sous les traits d'Albert Finney pour Le crime de l'Orient-Express ou de Peter Ustinov pour Mort sur le Nil ou Meurtre au soleil.Hotels de luxe, croisière entre gens du même monde, transports de tout confort, moustaches d'Hercule bien lustrées. Pas désagréable mais plus proche de Hollywood et de ses soirées costumées que de la campagne anglaise:voilà ce que m'inspirent ces chromos plaisants mais pesants.

  Non.Cinématographiquement l'univers d'Agatha Christie est bien plus présent dans les polars sans grand budget de George Pollock(61,62) ou Margaret Rutherford vieille dame indigne endosse la dégaine de Miss Marple. Cette série de quatre films:Murder ahoy,Murder at the gallop,Murder she said,Murder most foul qui ont été affublés parfois de titres français fantaisistes comme Le train de 16h50 ou Passage à tabac se déguste comme un vieux scotch au fond d'un manoir.Rien de rutilant comme au paragraphe ci-dessus mais un noir et blanc feuilletonnesque qui fait plaisir et des personnages de châtelains,d'héritiers,de gouvernantes,de médecins tous assassins en puissance mais à qui il sera beaucoup pardonné étant donné leur tare suprême et délicieuse:ils sont tous définitivement... britanniques.

20 juin 2006

Nord

Connaissez-vous la Scanie?Les noms y sont compliqués et sonnent un peu rauque.Alors j'ai pris une carte.On voyage déjà bien les doigts glissant sur le papier dans ces pays trop ignorés où prolifèrent les talents d'écrivains.La Scanie est le sud de la Suède,ce qui reste encore relativement nordique.Kurt Wallander est policier à Ystad,en bord de Mer Baltique.C'est le héros des romans d'Henning Mankell dont le nom commence à être connu en France.Le crime se porte bien partout.La moderne Suède a elle aussi perdu ses repères.Le commissaire Wallander,quinquagénaire humain,divorcé et père d'une grande fille,essaie simplement que tout aille moins mal.

Le modèle économique scandinave a ses limites et les tueurs en série,comme les divers trafiquants avec les pays baltes voisins et les réseaux de prostitution sont le quotidien de Wallander et de son équipe.Ce sont des bouquins passionnants où le côté technique de l'enquête va de pair avec l'observation très pointue des divers composants de la société scandinave,avec ses notables,ses laissés pour compte et ses enfants perdusIl semble que la vie ne soit pas toujours rose à la face nord de l'Europe,ce qui nous vaut au moins le plaisir de cotoyer un très grand auteur qui vit une partie de l'année au Mozambique et a également beaucoup écrit sur l'Afrique.Tous ses livres sont au Seuil.

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